lundi 28 novembre 2011

Suivi de Crise

La semaine était presque calme sur le front de la crise, presque.

Le mini-sommet européen n'a débouché sur rien qui permette de dégonfler le service de nos dettes; pas question pour la Banque Centrale Européenne d'acheter nos titres de dettes, ni d'augmenter leur rachat auprès des banques privées, ni de créer des eurobonds. Bref, nos taux font le yoyo avec une tendance globale à la hausse et les élus du peuple ne remettent pas en cause l'indépendance de la BCE.
Sur ce point justement, a-t-on ressorti des placards, une lettre de la BCE datée du mois d'août, au premier ministre italien Silvio Berlusconi. Cette lettre l'enjoignait de réaliser des "réformes d'importance". Comprendre néolibérales habituelles : négociation salariale par accord d'entreprise, "libéralisation totale de tous les services publics locaux", durcissement des conditions d'obtention de la retraite et baisse si nécessaire des salaires des fonctionnaires... 
La BCE donc, de son côté, remet en cause la souveraineté d'un Etat, en indiquant directement au chef de l'Etat la marche à suivre pour que celui-ci honore la "souveraineté de sa signature". Là, M. Trichet veut dire que l'Italie s'est engagée à payer. Marrant de voir quelle souveraineté prime sur l'autre ?
A noter que M. Jouyet et consorts pensent que seule la rigueur peut empêcher l'Italie d'emprunter à 7%.

De quoi apporter du crédit aux idées de Thomas Courtot du Collectif des Economistes Atterrés:

mercredi 16 novembre 2011

Intro actualisée au dernier message

Hier, le taux d'obligations français, c'est-à-dire le taux auquel la France emprunte ou réemprunte de l'argent pour payer ses factures, a atteint un record de 3.66 %.
En une journée, ce taux a grimpé de 0.2% soit, sur un total de 1600 milliards de dettes, 3.2 milliards sur un an perdu... dans la journée !!! Calcul un peu simpliste certes.

Alors, quelle journée ? Comment cela s'est il passé ?

Michel Barnier, commissaire européen représentant notre pays, proposait hier à la commission européenne une série de mesures cherchant à réguler le rôle des agences de notation. Avant cela, coïncidence ?, dès le matin, une banque allemande et un centre d'études européen affirment que la France ne mérite pas son triple A.
M. Barnier se fait recaler  par la commission ; impossible de se mettre d'accord sur ce texte au niveau européen et donc de remettre de l'ordre dans les avis de ces agences, conseils... Le parlement européen lui vote une interdiction temporaire des "CDS à nu". Bonne chose.

Bref, les régulateurs ne font pas leur travail, une officine ou une autre affirme que certains indicateurs laissent à penser que la France n'est pas en bonne santé et logiquement... il faut demander plus cher à l'Etat français pour continuer à lui prêter de l'argent.

Juste pour comparer, les pays qui ne monétisent pas ou que partiellement leurs dettes, et qui connaissent aussi des niveaux d'endettement importants ou plus importants que le nôtre et une croissance faible, empruntent à 2% pour les Etats-Unis et à 1% pour le Japon.

Pendant ce temps, notre président cherche à diviser les Français, à "cliver", entre ceux qui pensent encore que notre situation est due aux fraudeurs de la sécurité sociale et peuvent voter pour lui, et les autres, fraudeurs ou mieux informés ? Annonce à viser purement électorale, ça CLIVE grave.

Comparons toujours, la mesure d'hier sur le quatrième jour de carence rapporte 200 millions d'euros.

dimanche 13 novembre 2011

Suivi de campagne ou suivi de crise ?

Cette semaine aurait dû nous faire doucement rigoler: les sarko boys étaient déchaînés. Copé se fâchait sur le vote des étrangers, le mariage homosexuel faisait s'étouffer notre secrétaire d'Etat à la famille, et l'explosion fratricide des 7 familles de l'UMP guettait...

Mais au lieu de ça, nous avons eu le droit à une centration médiatique sur le regain de popularité de Nicolas Sarkozy dû à son activité sur la scène internationale. "La séquence internationale relance le président..."

Mais quelle kermesse !!! 

Et ce pour deux raisons.

Premièrement, ces "analyses" resservient toute la semaine montrent le fonctionnement de nos grands médias: l'analyse de l'action de nos hommes politiques s'efface devant celle de leur communication. Jamais de fond, toujours de la forme !!

Surtout, ce refus de nous parler du fond montre leur absence de considération à notre égard. Sommes-nous trop imbéciles pour comprendre l'impact des décisions du G20 sur l'économie de nos pays ? Le fait que Angela, Nicolas et Barack se remuent doit-il nous rassurer ? Doit-on se satisfaire du fait que leurs actions aient "rassuré les marchés" ? Notre besoin d'information doit se contenter de cela et nous permettre de dormir tranquille ?

Signalons tout de même les analyses de fond, de haut-niveau, de certains journalistes qui frappent toujours aussi fort par leur enfermement idéologique : la Une du Point, par exemple, nous donne à réfléchir en assimilant l'entrée de la Grèce dans l'Euro à une des grandes erreurs de l'Histoire. Si si regardez; Tordant !! Ou encore cette journaliste politique d'Europe 1: "Les Verts, tellement hostiles au progrès..."

Deuxième raison d'un énervement manifeste face à ce discours "séquence internationale", si analyser la communication de nos représentants politiques et de celle des grands acteurs de la politique économique européenne est une ânerie, ne pas discuter des résultats de leurs actions en est une autre parce que l'on moins que l'on puisse dire en seulement une semaine, c'est qu'ils prêtent à discussion.
Certains économistes en discutent. A eux la parole.

Après une semaine de G20, aux réjouissances sur la possibilité de mise en place aux calandes... grecques d'une taxe sur les transactions financières ont succédé une hausse des taux d'emprunts de nos états.
Oui, le G20 devait sauver le monde et 3 jours plus tard, l'Italie empruntait à 7%, record historique. Faute à son instabilité politique ou faute à Mario Draghi qui en fermant la pauvre petite porte des eurobonds nous envoie tous au casse-pipe (cf billet précédent) ?

M. Harribey réalise un fort bel article sur ce point notamment, et surtout il montre comment nos dirigeants réemploient les mêmes recettes de la crise de 2008 appliquées, à la sphère des dettes publiques.
Très technique, pointu, mais une analyse qui vaut le détour.

Ajoutons à cela deux processus collectifs lancés par cette semaine: le premier mouvement s'intitule "Collectif pour un audit citoyen de la dette publique" et souhaite mettre à jour les processus qui ont amené à la création de la dette, de nos dettes dans chaque institution, chaque administration, chaque collectivité territoriale. Une pétition est en ligne que vous pouvez signer pour appuyer ce mouvement. L'éditorial support sur le site est limpide...

Le deuxième ne constitue pas un lancement mais une belle relance du collectif des économistes atterrés. Site, publications, articles, vous trouverez tout ce qu'il faut ici et des nouvelles d'un beau pays dont on ne parle jamais mais qui connaît un renouveau politique, économique et démocratique: l'Islande... Ces irresponsables qui refusent de payer...

Coriat, B., Lantenois, C., Crise, Faillite et Défaut : Economie et Politique de la Restructuration de la dette islandaise, Site arrerres.org, novembre 2011.

Bref, pendant que nous sommes sensés nous laisser berner par le show médiatique de nos dirigeants, leurs actions et plus encore celle de la BCE font grimper nos taux d'emprunts et nos dettes. Ils nous jouent la carte de l'harmonisation et de la gouvernance mondiale, tout en mettant en oeuvre nationalement des politiques opposées. Choisissons, en France, l'austérité puisque nous vivons au-dessus de nos moyens: ce n'est pas comme si nous comptions déjà 7 millions de travailleurs pauvres et que notre économie détruisait 30 000 emplois par mois.

dimanche 6 novembre 2011

Quelle semaine...

Oui, chers amis, quelle semaine !

Aux oubliettes, Piketty, Montebourg et cie, même si une contre-analyse, facile, du magazine Challenges vaudrait/vaudra le détour.
Les 5 mythes de la démondialisation, Challenges.fr, octobre 2011

Cette semaine, Jean-Claude Trichet est remplacé par Mario Draghi à la tête de la BCE. Celui-ci commence par changer son fusil d'épaule ou plutôt, notre fusil, puisqu'il s'agit de nos outils principaux de politique économique: la BCE diminue ses taux pour relancer l'économie en prenant le terrible risque de l'inflation, honnie depuis des années, mais ferme le ban du refinancement des Etats ; la BCE ne rachètera plus, ou dans une moindre mesure, leurs obligations ! Enorme coup de tonnerre !

Pour bien comprendre, il est utile de rappeler que la France dès 1973 puis l'Union Européenne se sont engagées dans une voie très particulière, peut-être unique au monde: elles se sont auto-interdites de refinancer leurs dettes par des prêts directs de leurs Banques Centrales. La Réserve Fédérale aux Etats-Unis rachètent les bons du Trésor et entretient/grossit sa dette à coût moindre. En Europe, nous empruntons de l'argent (fictif) à des banques privées, à des taux fixés par les marchés. Et quand ces banques n'en ont plus (oui, il y a des règles à la création d'argent fictif), nous prêtons aux banques pour qu'elles nous le reprêtent à un taux supérieur.

Il s'agit là du point fondamental, de l'origine de la crise actuelle. Le Japon emprunte auprès des Japonais (nationalisation de la dette), les Etats-Unis font marcher la planche à billets (monétisation de la dette) et nous, nous aurions résolu le problème de la dette si nous ne payions pas des intérêts à nos créanciers privés depuis des décennies. Ce n'est pas clair ? Le diaporama suivant est très bien fait, même si l'absence de sources n'est pas excusable. Désolé.

Ensuite, Angela et Nicolas jouent les caïds de cour d'école pour interdire à un président élu de consulter son peuple. Passons sur l'absence de souveraineté d'un peuple, Nicolas est un habitué: son premier fait de gloire de président ayant été de s'asseoir sur notre vote pour signer le traité de Lisbonne. Plus grave, nos deux chefs d'Etat font transformer le oui ou non à un mauvais texte, en une question sur la sortie de la zone euro. Sortie qui enverrait la Grèce vers un marasme économique et financier délirant vues les structures de l'économie mondiale actuelle (Combien vaut la drachme nouvelle ? Combien exigera-t-on de dollars ou d'euros pour une drachme sur le marché des changes, pour les importations des produits de base qui ne sont plus produits en Grèce ?). Regardez le tableau suivant qui indique les intérêts actuels payés par la Grèce avec cette histoire de financements auprès des banques. Et Mario Draghi veut en rajouter une couche !

Sur le texte proposé aux Grecs,

Sur les taux payés par la Grèce, oui la fin de la courbe est bien réelle, zoomez pour avoir le détail au jour le jour.

Et un article prémonitoire (18 mois de date) qui porte joliment son nom sur l'orthodoxie allemande :


Puis Barack Obama et Nicolas Sarkozy nous font un sketch de franche camaraderie sur fond de gouvernance mondiale en marche. Barack Obama, la semaine précédente, a été touché par la grâce en relançant l'investissement public et en revenant sur le maintien des baisses d'impôts de Bush destinées aux classes moyennes. Tout est dans la définition des classes moyennes: Bush, et Obama en les reconduisant, avaient assimilées celles-ci aux ménages ayant moins de 250 000 dollars de revenus par an. Obama s'étant grandement écarté, vers la droite, de son programme de campagne, il y revient en cette année de crise économique et électorale. 
Mais Nico et Barack nous la jouent copains de la gouvernance mondiale alors qu'ils ont des stratégies nationales opposés: les Américains misent sur la croissance et l'emploi quand nous misons sur l'austérité !

Et pour finir, Beaudoin Prot, conseiller économique influent de Nicolas Sarkozy,en catimini selon P. Larrouturou, annonce que la BNP voit fondre son bénéfice de 70%. La plus solide des banques françaises, nous disait-on, grâce à son modèle fondé sur une banque de dépôt sérieuse, est surexposée à la dette grecque et, dans le même temps, risque d'être condamné à rembourser l'argent qu'elle aurait reçu des placements de Bernard Madoff.


Décidément, dure semaine...